17.06.2019
LE HARCÈLEMENT PSYCHOLOGIQUE AU TRAVAIL OU LE SUPPLICE DE LA GOUTTE D’EAU
Paula est infirmière dans une petite clinique médicale de Montréal. Elle a toujours effectué un bon travail et jouit d’une réputation irréprochable auprès de ses collègues. Or, depuis quelques semaines, elle est victime de commentaires déplacés de la part de Jean-Marc, un infirmier travaillant à la même clinique qu’elle. Ce dernier se permet beaucoup de familiarités avec elle, notamment en l’interpellant avec des noms tels que « ma belle chouette » ou « mon petit poussin » et en lui faisant des commentaires de nature sexuelle au sujet de son apparence. Il l’a également invitée à prendre un verre avec lui, ce qu’elle a refusé, prétextant qu’elle ne voulait pas confondre sa vie professionnelle et sa vie personnelle. Depuis ce temps, Jean-Marc est très désagréable et ne cesse de la critiquer ouvertement devant ses collègues de travail, en plus de lui reprocher de commettre de nombreuses erreurs. Paula est allée se plaindre de cette situation auprès du médecin propriétaire de la clinique où elle travaille, mais ce dernier a banalisé la situation et lui a dit d’avaler sa pilule. Paula vit beaucoup de stress au travail et se sent sans recours. Elle est constamment angoissée et pleure souvent. Souhaitant que la situation cesse, elle dépose finalement une plainte de harcèlement psychologique à la CNESST.
LE HARCÈLEMENT PSYCHOLOGIQUE
Malgré ce qui précède, il est prévu qu’une seule conduite grave peut constituer du harcèlement psychologique si elle produit un effet nocif continu sur le salarié.
Depuis le 12 juin 2018, un employé qui vit une situation s’apparentant à du harcèlement psychologique et qui souhaite porter plainte a deux ans à partir de la dernière manifestation de cette conduite pour le faire[3].
LES OBLIGATIONS DE L’EMPLOYEUR
En effet, l’article 81.19 de la loi stipule que « l’employeur doit prendre les moyens raisonnables pour prévenir le harcèlement psychologique et, lorsqu’une telle conduite est portée à sa connaissance, pour le faire cesser. Il doit notamment adopter et rendre disponible à ses salariés une politique de prévention du harcèlement psychologique et de traitement des plaintes, comprenant entre autres un volet sur les conduites qui se manifestent par des paroles, des actes ou des gestes à caractère sexuel ».
Il est à noter que ces trois principales obligations demeurent, indépendamment du fait que les allégations de harcèlement psychologique visent deux salariés ou un représentant de l’employeur et un salarié.
LA POLITIQUE DE PRÉVENTION DU HARCÈLEMENT PSYCHOLOGIQUE
Néanmoins, pour éviter les sources de conflit découlant d’ambiguïtés et ainsi être complète, la politique de prévention du harcèlement psychologique doit contenir un certain nombre d’éléments, tels que :
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les objectifs ;
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l’engagement de l’employeur ;
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le champ d’application ;
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les définitions ;
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les rôles et responsabilités de chacun ;
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les procédures, dont celle en matière de traitement des plaintes ;
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les interventions ;
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les mesures possibles ;
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l’évaluation, la révision et la possibilité de mettre à jour la politique sans préavis.
LE PROCESSUS DE TRAITEMENT DES PLAINTES
Dans la situation de Paula, le médecin propriétaire de la clinique aurait dû enclencher un tel processus d’enquête ou donner le mandat d’agir à un enquêteur accrédité. Il aurait dû procéder de la façon suivante :
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rencontrer Paula et prendre sa version des faits ;
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rencontrer ensuite Jean-Marc pour prendre sa version des faits et le confronter aux allégations de Paula ;
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rencontrer dans un troisième temps l’ensemble des témoins des manifestations alléguées de harcèlement psychologique ;
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évaluer la nécessité de rencontrer de nouveau Paula, Jean-Marc ou des témoins pour approfondir les différents événements allégués ;
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analyser les faits recueillis dans une perspective globale, en se demandant si une personne raisonnable, normalement diligente et prudente, placée dans les mêmes circonstances que Paula, estimerait que Jean-Marc manifeste une conduite vexatoire à son égard[4].
Vient finalement le moment d’informer les parties intéressées des conclusions de l’enquête. Le cas échéant, des mesures correctives, allant jusqu’au congédiement, peuvent être prises à l’égard du ou des présumés harceleurs.
L’EXERCICE DU DROIT DE GESTION
Si l’intervention de l’employeur est justifiée par le comportement du salarié et que l’employeur est intervenu de façon proportionnelle et légitime, il ne s’agit pas de harcèlement psychologique.
LA VICTIMISATION
LES RAPPORTS SOCIAUX DIFFICILES
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
Les employeurs qui omettent d’adopter une politique de prévention du harcèlement psychologique s’exposent à des sanctions pénales allant de 600 $ à 1200 $, en plus de se rendre vulnérables dans le cadre d’un processus judiciaire assurément long et coûteux.